Dernièrement, j’ai répondu à des questions d’une aspirante auteure, qui en est à ses premiers balbutiements dans sa démarche.
C’est l’histoire classique, la même que j’ai vécue : on rêve d’écrire depuis très, très longtemps, et puis un jour on décide de plonger et de se mettre à écrire. Et là, on frappe un mur : on n’y connait rien, on entre dans un écosystème totalement inconnu et tout nous semble une montagne. On se sent seul, on aimerait bien que quelqu’un nous explique comment ça marche tout ça.
Qu’est-ce qu’on doit écrire? Comment doit-on écrire? A-t-on des chances d’être publié? Ce qu’on fait sera-t-il assez bon? Est-ce que nos proches vont aimer nos textes? Est-ce qu’il y aura un public pour ça?
Je pourrais continuer d’énumérer des questions pendant toute une journée si je le voulais.
On n’a même pas commencé et déjà, on découvre le fameux doute. Doute de soi-même, de ses capacités, du potentiel de commercialisation de ses œuvres.
Chaque fois que je réponds à un aspirant auteur, je me rends compte à quel point j’en ai parcouru, du chemin, depuis mes débuts en 2006. Et chaque fois, je suis confrontée à mon impuissance. Comment pourrais-je transmettre le fruit de mon expérience, en toute honnêteté, sans pour autant décourager celui ou celle qui commence? Comment explorer tous les aspects du processus littéraire, aborder tous les bémols, alors que je n’ai pas tout vécu, tout exploré, et que c’est ma seule expérience qui va parler?
J’ai lu beaucoup de livres de conseils écrits par des auteurs, au sujet de l’écriture, et je me suis rendu compte que nous avons tous eu des parcours différents, des processus différents, et qu’il n’y a pas vraiment de recette à suivre. C’est la même chose pour les ateliers de création littéraire, les conférences, le coaching, les masterclass (et tout ce que vous voudrez comme moyen, pour un auteur, de transmettre ses connaissances à autrui) : chacun pense avoir des réponses, des recettes, des chemins plus évidents à suivre, mais au bout du compte, j’en comprends surtout que chacun a son propre chemin à arpenter. On peut écouter les autres auteurs et s’en inspirer (il y a plein de bons conseils là-dedans), mais il faudra éventuellement découvrir ce qui est « vrai » pour nous et ce qui ne l’est pas nécessairement.
C'est aussi ça, être un artiste : avoir sa propre voie, sa propre manière de vivre son art. C'est un parcours de longue haleine. On ne sait pas tout au début, on a beaucoup à apprendre. L'expérience va venir, on va comprendre de plus en plus ce qu'on veut faire et comment on veut arriver à le faire, mais ça va prendre du temps.
Je vais maintenant vous révéler plusieurs « vérités » (qui sont mes vérités à moi, on s’entend bien). Je précise que si vous êtes aspirant auteur, mon but n’est pas de vous décourager, mais plutôt de vous faire prendre conscience de certains aspects reliés au rêve d’écrire et d’être publié.
« Vérité » numéro 1
Dans tous les milieux artistiques, il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Ceux qui parviennent à réaliser leurs rêves doivent souvent faire preuve d’une persistance hors du commun, travailler très fort à s’améliorer et développer des compétences (ex. : l’entregent, les techniques reliées à leur art) qui ne leur étaient pas innées. Et certains auteurs, malgré tous leurs efforts, n’arriveront pas à atteindre leurs objectifs de publication. C’est comme ça. Il y a des gens pour qui ça marche et d’autres non.
Bon, moi qui suis du genre optimiste, je pense que si on ne lâche pas, si on travaille super fort, il y a quand même moyen d’arriver à quelque chose. Cet avis n’est pas partagé par tout le monde, je tiens à le préciser. On pourrait ajouter toutes sortes de nuances, mais disons que je crois qu’il y a de la place pour tout le monde sous le soleil. Et personnellement, je n’ai pas peur de la compétition. Je donne des trucs à plein de monde et tant mieux si ça leur sert. Tant mieux si les gens arrivent à obtenir des résultats et qu’ils sont contents. On mérite tous d’arriver à réaliser nos rêves. Ce n’est pas pour rien que l’autopublication est aussi populaire en ce moment. Si quelqu’un veut écrire, qu’il écrive. Comme tous les autres arts, c’est un moyen de s’exprimer et de s’extérioriser, ce qui est très positif.
« Vérité » numéro 2
Plein de gens rêvent d’écrire, mais comme on le dit souvent dans le milieu littéraire (surtout quand des gens viennent nous voir en salon du livre pour nous parler de leurs projets sans en avoir écrit une seule ligne) : pour 100* personnes qui rêvent d’écrire, 1 seule ira jusqu’au bout de son projet. (* On comprend bien que ce sont des chiffres théoriques.)
Donc, ne vous étonnez pas si un auteur aguerri, à qui vous parlez de votre super projet que vous allez écrire « un beau jour », ne s’extasie pas à propos de votre merveilleuse idée. Des idées, on en a tous à la pelle. Par contre, entre l’idée et l’écriture du projet au complet, il y a un monde de différence et tout un chemin à parcourir.
Le fait de se commettre et de s’asseoir pour écrire notre texte, notre nouvelle, notre roman, est déjà digne d’intérêt. On se rend compte que ce n’est pas aussi facile qu’on le pense. Et si on se rend au bout du projet, on a de bonnes raisons d’être fier. On devient la personne parmi 100 autres qui est passé du rêve à l’action. Bravo! C’est loin d’être fini, il y a d’autres étapes à venir, mais c’est déjà un exploit en soi.
« Vérité » numéro 3
Vous avez le droit d’écrire pour vous-même. Vous avez le droit d’avoir du plaisir, d’être dans la passion, de vous réaliser en tant que personne.
Le résultat, la publication éventuelle, c’est une autre étape. Ce n’est pas obligé d’être votre objectif, surtout au départ. Ce n'est même pas mon objectif pour tous les textes que j'écris! Il y en a qui existent pour moi seulement, pour mon plaisir personnel, pour exorciser des démons intérieurs, pour tester une approche ou une technique, pour exprimer des ressentis d'une façon qui ne serait pas commerciale. Ça n'a pas moins de valeur pour autant.
Je sais, quand on écrit, on rêve d'être publié. C'est la même chose pour moi. Par contre, la publication n'est pas le seul but à viser. Dans notre démarche globale, on peut viser l’amélioration de nos écrits, l’expression de soi, le partage avec notre entourage, sans pour autant souhaiter tomber dans une démarche professionnelle. Toute démarche professionnelle implique un effort à mettre, de la compétition, des refus éventuels et les déceptions qui vont avec. C'est normal, ça fait partie du jeu. C'est pour ça que lorsqu'on obtient une acceptation, on a bien raison d'être content. Rien n'est jamais garanti, mais même si ça ne fonctionne pas, nos écrits n'ont pas moins de valeur pour autant. On y a mis du temps, de nos tripes, et ils font partie de nos accomplissements.
J’espère avoir aidé cette aspirante auteure à avancer de quelques pas dans sa démarche. Je lui ai donné quelques conseils, en fonction de ce qu’elle souhaite écrire. À ce stade-ci, j’ignore si elle fera partie des « 1 personne sur 100 » à se rendre au bout de son projet, mais ce n’est pas grave. Déjà, d’avoir un rêve d’écriture et de commencer à poser des questions, c’est un bon début. Le reste lui appartient, comme il appartient à chaque artiste de tracer son chemin et de découvrir ce qu’il souhaite accomplir, et à quel point il est prêt à y mettre des efforts.